lundi 17 décembre 2012

Trois lumières



Voilà un texte parfait. Dans le genre de 'Quatre soldats' de Hubert Mingarelli. Un texte court, prenant, mystérieux dans lequel on entre et on l'on est heureux d'être.

Cela se passe en Irlande. Une fillette, appelons-la Pétale comme le fait Kinsella, le type qui, avec sa femme, accueille et héberge Pétale quelques semaines. Pourquoi elle est là? On n'en sait pas grand chose, même quand on lui explique. D'accord, il y a un bébé qui arrive, mais quand même, la ribambelle est nombreuse, alors pourquoi elle? Voilà le genre de questions que l'on se pose, comme Pétale, de temps en temps, mais finalement, on laisse les jours passer et on s'installe dans l'histoire comme Pétale s'installe chez les Kinsella. Et puis un jour, il faut s'en aller. Les pourquoi seront toujours là. Tout l'art de Claire Keegan est cette capacité à suggérer, à montrer, à installer des ambiances et des scènes auxquelles on participe.

Elle montre bien comment se passe la vie à la campagne, dans un hameau, les secrets, les curiosités entre voisins, les commérages, les regards des uns et des autres. La sécheresse qui accable les habitants pendant cet été extraordinaire correspond à la sécheresse de leurs échanges, il y a une économie forcenée dans les échanges, comme si les mots étaient précieux au point de devoir les garder pour soi et ne donner que ceux qu'il faut.

Une belle belle réussite.


C'est comme ça que ça finit :

"Si une partie de moi veut de tout coeur descendre et dire qui s'est tellement bien occupée de moi que je n'en parlerai jamais, absolument jamais, quelque chose de plus profond me maintient là dans les bras de Kinsella toujours, cramponnée.
"Papa", je l'appelle sans relâche, je l'avertis sans relâche. "Papa"


Claire Keegan - Trois lumières - Sabine Wespieser, 2011 (10/18, 2012) 

 

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